Le temple de la déesse amazighe Lamia

Temple déesse amazighe Lamia

Le temple de Slontah ou d’Aslonta est une petite structure située en Lybie à environ 25 km de la ville de Al Bayda, perdue dans une vallée rocheuse des Montagnes Vertes.

Peu étudié jusqu’à ce jour, il présente des caractéristiques qui en font un édifice particulièrement remarquable.

Avant la conquête par les Grecs d’Alexandre le Grand en 331 avant jc, la région de la Cyrénaïque est habitée depuis des temps très anciens par des tribus Amazighs, des nomades à la culture mal connue.

Le temple est richement décoré de sculptures représentant des visages humains, des silhouettes humaines et animales et des têtes désincarnées, le tout façonné directement sur les parois de la grotte dans un style unique à ce lieu.

Il se comprend d’une entrée basse en demi-cercle, qui donnait dans une grotte parsemée de colonnes basses circulaires.

En 1993 la structure était endommagée par une inondation qui provoqua l’effondrement du toit de la grotte : elle a été partiellement restaurée aujourd’hui.

L’un des ensemble les plus étonnants se dresse directement à gauche de l’entrée : un groupe de cinq têtes garde l’accès au temple, le visage empreint d’une curieuse émotion.

Si leur allure est typiquement africaine, le style est vraiment particulier.

Plus loin à l’intérieur, un autre ensemble étonnant se compose d’un bas-relief illustrant une procession autour d’un serpent géant, peut-être une cérémonie religieuse associé au culte de la déesse libyenne Lamia.

Ce culte d'une divinité reptilienne est assez commun en Lybie, région connue dans l'Antiquité pour l’abondance et la dangerosité de ses serpents : d’après la mythologie grecque, c’était des gouttes de sang provenant de la tête tranchée de Méduse qui les avaient enfantés.

Parmi les peuples berbères, les Psylli était réputés comme charmeurs et dresseurs de serpents : ils auraient même été immunisés à leur venin, et Octave aurait fait appel à leurs services pour essayer de sauver Cléopâtre.

Lamia était une divinité présidant à la fois à la prospérité et à la mort.

Dans la mythologie grecque, c’était une fille du dieu Poséidon et de la nymphe Lybie : séduite par Zeus, elle lui avait donné des enfants avant d’être rattrapée par la vengeance d’Héra, la femme de Zeus la maudit en empêchant ses paupières de se fermer, devenue folle, Lamia dévora ses propres enfants et se transforma en monstre mi-femme mi-serpent, elle poursuivait de sa folie les jeunes nourrissons jusqu'à ce que Zeus eut pitié d'elle et lui permit de se retirer les yeux.

D'après ces éléments, il semble que ce pourrait être une divinité chtonienne, liée à la fécondité et à la divinitation.

Ce n'est que plus tard, pendant la période hellénistique, que le terme lamia désigne un monstre suceur de sang et tueur d'enfant.

Pendant la période romaine, lamia est un synonyme de sorcière, comme on peut le voir dans les Métamorphoses d'Apulée, lui-même écrivain d'origine Amazigh du IIe siècle.

Plus loin se dresse un autel, une table de pierre sculptée avec quatre porcs, trois autres têtes de porcs et deux têtes d'hommes barbus.

Cet ensemble a donné son autre nom au temple, la Grotte des Porcs.

C'est un aménagement plus tardif, remontant sans doute au IIe siècle avant jc, quand l'influence grecque avait triomphé du tabou indigène sur la viande de porc.

Avec ses sculptures étranges, ce petit temple d'une religion oubliée illustre la façon dont les divinités anciennes ont été intégrées dans les mythes et légendes, de la déesse souterraine aux dons de prophéties au monstre dévoreur d'enfants, puis à la séductrice vampirique.

Nadia Tudert

Rédaction Amazigh 24
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